Développée au cours des années 1980 par des associations militantes comme Aides, Act Up ou Médecins du Mondes, la réduction des risques auprès des usagers de drogues subit beaucoup de préjugés. Pourtant, il s’agit d’une priorité de santé publique.
Années 70-80 : état des lieux d’une hécatombe
Les années 1970 et 1980 sont marquées par deux événements majeurs : la prolifération des drogues dures injectables et l’épidémie du VIH. A cette époque, les professionnels de santé et les gouvernements peinent à mettre en place des mesures préventives : dans l’inconscient collectif, le “camé” reste un citoyen de seconde zone. L’accès aux traitements de substitution est difficile. Il est impossible de se procurer facilement du matériel stérile. Les seringues circulent entre plusieurs personnes, des dizaines de fois, sont aiguisées au papier de verre, l’eau utilisée pour l’injection n’est pas filtrée… Il faudra attendre l’épidémie du VIH pour que des associations et des professionnels de santé mettent en place les premiers programmes d’échange de seringues, en toute illégalité.
La réduction des risques n’est pas forcément ce qu’on croit
Les programmes de réduction des risques sont souvent accusés de promouvoir l’usage des drogues. En réalité, il s’agit d’une démarche pragmatique d’accompagnement des usagers, avant tout pour réduire les risques de contamination, mais aussi pour créer un dialogue et éviter l’isolement et la marginalisation des personnes concernées. Aujourd’hui, plusieurs types d’actions sont menées par les associations, avec le soutien de l’Etat :
- mise à disposition de matériel stérile pour enrayer l’épidémie du VIH mais aussi infections et risques liés à l’injection
- prévention dans la rue, en squat, en milieu festif et en milieu carcéral
- accueil et accompagnement dans des centres médico-sociaux
- soutien des usagers en rétablissement : traitements de substitution, réintégration socio-économique…
Mais ces programmes ne s’adressent pas qu’aux usagers de drogues injectables. Les associations interviennent également dans le cadre d’actions préventives liées à la surdose, à la santé mentale et aux thérapies anti-rétrovirales auprès de consommateurs de tous types de drogues.
Les salles de consommation à moindre risque : santé et sécurité pour tous
Depuis octobre 2016, ces lieux sont expérimentés en France. Egalement appelé “salle de shoot”, ce dispositif subit encore de nombreux préjugés. Il s’agit en réalité d’un lieu dédié aux usagers les plus fragiles, pour les accompagner à la fois dans leur pratique d’injection, mais aussi dans leur accès aux soins. Ces salles permettent en outre d’améliorer le cadre de vie des riverains et la sécurité du quartier, pour tous.
L’usager est d’abord accueilli par l’équipe et présente à un professionnel le produit qu’il veut consommer. Il peut ensuite récupérer du matériel stérile à usage unique pour injecter ou inhaler le produit (“chasser le dragon” : pratique qui consiste à inhaler les vapeurs d’une drogue pour casser le geste de l’injection). Après la consommation, l’usager peut prendre un temps de repos et, s’il le souhaite, solliciter un professionnel pour faire le point sur sa consommation, ses soins, ou encore demander un examen de dépistage.
Toutes les pratiques de réduction des risques sont des problématiques de santé publique car, en faisant prendre conscience à l’usager des risques que peut poser sa consommation, elle évite la marginalisation. Pousser la porte d’un centre médico-social a souvent été, pour beaucoup d’usagers, une première étape vers le sevrage.